Articles

Spiritisme : Pourquoi ce n’est jamais votre grand-mère qui répond

Par Philippe Loneux |
Une main touche la goutte d'une planche Ouija à la lueur d'une bougie, tandis qu'une silhouette sombre et floue se reflète dans un miroir en arrière-plan.

La pièce est plongée dans la pénombre. L’air semble soudain plus lourd, chargé d’électricité statique. Au centre de la table, une simple bougie vacille sans qu’il n’y ait le moindre courant d’air. Vos doigts effleurent à peine le verre renversé. Soudain, il glisse. Un frisson violent vous parcourt la nuque. « Maman ? Est-ce toi ? »

Le verre se dirige vers le « OUI ». Les larmes montent. Vous avez une réponse, des détails intimes, des mots qu’elle seule utilisait. C’est bouleversant.

Pourtant, là où vous ressentez un immense réconfort, l’Église catholique déclenche une alerte rouge. Pour le Vatican et ses théologiens, ce qui vient de se passer n’est ni un miracle, ni un adieu apaisant. C’est une usurpation d’identité spirituelle.

Selon la doctrine chrétienne, quelqu’un vous a bien répondu. Mais ce n’est pas l’âme de votre mère.

Le monde invisible : Ce n’est pas un « open bar »

Pour comprendre cette mise en garde sévère, il faut saisir comment le catholicisme envisage l’au-delà. Loin d’être une zone floue, la tradition biblique décrit un monde invisible très hiérarchisé, peuplé de deux types d’entités distinctes :

  • Les Anges (et les saints) : Ce sont les serviteurs de Dieu. Ils vivent dans la béatitude et respectent totalement l’ordre divin.
  • Les Démons (anges déchus) : Des intelligences supérieures, mais brisées, dont la volonté est séparée de Dieu.

    C’est ici que l’argument de l’Église devient technique. Pourquoi affirme-t-elle que votre grand-mère ne viendra pas à une séance de spiritisme ?

    Parce que les âmes des défunts sont « entre les mains de Dieu ». Elles ne sont pas errantes, attendant qu’on les siffle via une planche Ouija. Quant aux Anges, ils n’obéissent qu’au Créateur. Ils ne se soumettent jamais à la volonté d’un médium et ne participent pas à des rituels de divination, pratique formellement interdite par les Écritures (Deutéronome 18:10-12).

    Si les anges ne viennent pas par respect pour Dieu, et que les défunts sont dans la paix (ou en purification), qui reste-t-il pour répondre à l’appel ?

    L’arnaque spirituelle : La théorie du « Phishing » céleste

    C’est la conclusion glaçante des prêtres exorcistes : les entités qui se manifestent lors des séances sont, par élimination et par nature, des démons.

    L’image du diable rouge à cornes est un cliché pour enfants. La réalité décrite par la théologie est plus subtile : le démon est le « Singe de Dieu », un imitateur de génie. Pour l’Église, le spiritisme s’apparente à une vaste opération de « phishing » (hameçonnage). Le Pape François lors de son discours du 25 septembre 2024 disait: « La plus grande ruse du diable est de faire croire qu’il n’existe pas ».

    Comment l’illusion fonctionne-t-elle ?

    Ces intelligences spirituelles observent les humains depuis des millénaires. Elles connaissent nos failles psychologiques et notre histoire.

    • Vous demandez un surnom caché ? L’entité le connaît.

    • Vous évoquez un souvenir précis ? L’entité l’a vu.

    Le démon se fait passer pour le défunt en utilisant des informations réelles pour gagner votre confiance. Le but théologique est simple : créer une dépendance, vous détourner de la foi et vous lier à une présence occulte sous couvert d’amour familial.

    Pourquoi l’Église dit que c’est « bien pire » qu’un jeu

    Participer à une séance, c’est, selon l’expression de nombreux théologiens, laisser la porte de son âme ouverte dans un quartier malfamé. Vous ne contrôlez pas qui entre.

    Les mises en garde du clergé ne sont pas des menaces en l’air, mais reposent sur des cas concrets rapportés lors de ministères de délivrance :

    • L’infestation : Des bruits, des déplacements d’objets ou des ombres commencent à se produire en dehors des séances. L’invité s’incruste.

    • La fragilisation psychique : Ce qui commence par des messages d’espoir finit souvent, selon les témoignages, par des injonctions au désespoir, à la haine ou à l’angoisse.

    • La rupture spirituelle : La recherche de « pouvoirs » ou de « signes » remplace la confiance en Dieu.

    Ici, l’Église agit comme un guide de haute montagne qui vous hurle de ne pas marcher sur une corniche de neige : ce n’est pas pour vous embêter, c’est parce qu’il sait que c’est le vide en dessous!

    Les conseils pour sortir de l’engrenage

    Si vous avez touché à ces pratiques, la position de l’Église est claire : ne paniquez pas, mais agissez. Voici la marche à suivre préconisée par les prêtres accompagnateurs :

    • Coupez tout contact. Jetez (ne donnez pas) tout le matériel : livres occultes, pendules, tarots, planches. C’est un acte symbolique de rupture fort.

    • Ne dialoguez plus. Si vous entendez encore des choses ou ressentez des présences, n’y prêtez aucune attention. Le dialogue nourrit le lien.

    • Le « nettoyage » spirituel. Pour un catholique, la confession est l’acte de libération par excellence. Avouer cette imprudence brise le pacte tacite passé avec ces entités.

    • La prière, pas l’invocation. L’Église encourage à prier pour les défunts, mais interdit de les invoquer. La nuance est capitale : vous confiez votre amour à Dieu, qui le transmet. C’est la seule voie sécurisée.

    Le respect des morts, c’est peut-être justement de les laisser dans leur silence. Pensons-y.

    Vous sentez que le sol se dérobe ? Vous faites face à des choses que la raison peine à expliquer ? N’affrontez pas cela dans l’isolement. Le premier pas vers l’apaisement, c’est la parole. Tournez-vous vers une écoute qualifiée : médecin, psychologue ou prêtre. Ils sauront vous guider sans jugement. Sachez d’ailleurs que, loin des clichés, l’Église et les professionnels de santé travaillent souvent main dans la main pour prendre soin de la personne dans sa globalité.

    Jésus n’est pas né il y a 2026 ans : Le vrai décalage de notre calendrier est « énorme »
    Dans la même catégorie

    Jésus n’est pas né il y a 2026 ans : Le vrai décalage de notre calendrier est « énorme »

    Lire l’article

    Questions fréquentes

    1. Si le verre bouge, est-ce forcément un démon selon l’Église ?

    Pas nécessairement. L’Église reste prudente et reconnaît les explications naturelles. Souvent, c’est l’effet idéomoteur : votre subconscient, poussé par un désir intense, fait contracter vos muscles à votre insu. C’est vous qui bougez. Toutefois, l’Église avertit : l’intention d’invoquer suffit à ouvrir une porte spirituelle dangereuse, même si le mouvement est purement mécanique.

    2. Peut-on recevoir un signe d’un défunt sans danger ?

    La nuance est fine mais cruciale. La théologie admet que Dieu peut, exceptionnellement, permettre à une âme de se manifester (un parfum, une paix soudaine, un rêve) pour rassurer les vivants. La différence ? L’initiative vient du Ciel, pas de vous. Si vous forcez la porte via un médium, vous sortez du cadre protégé.

    3. J’ai fait du spiritisme étant ado, suis-je en danger ?

    Non, ne vivez pas dans la peur. Dieu est plus grand que nos erreurs de jeunesse. Si vous ne ressentez rien de particulier, vivez votre vie. Si vous avez des angoisses persistantes ou une répulsion inexpliquée pour la prière depuis, parlez-en simplement à un prêtre. Une prière de délivrance ou une confession sincère suffit généralement à tout remettre en ordre.

    À propos de l’auteur Chroniqueur spécialisé en histoire des croyances et symbolisme, explore les frontières du visible. Il décrypte aussi bien les traditions religieuses que les phénomènes ésotériques et les grands mystères, en cherchant toujours le sens caché sous le prisme de l’analyse historique.
    L’âme n’est-elle qu’un réseau de neurones ? Ce que la science dit de la conscience
    Dernier article publié

    L’âme n’est-elle qu’un réseau de neurones ? Ce que la science dit de la conscience

    Lire l’article

    Rejoignez le cercle des curieux

    Ne manquez aucune exploration. Recevez périodiquement nos analyses sur l’histoire, le sacré et les mystères qui nous entourent.