Un évangile apocryphe ancien, transmis dans deux traditions distinctes
L’Évangile des Égyptiens est un texte apocryphe chrétien dont deux versions très différentes nous sont parvenues. L’une est mentionnée par Clément d’Alexandrie, et l’autre retrouvée en copte dans la bibliothèque de Nag Hammadi.
Ces deux traditions n’ont pas le même contenu, mais elles partagent un nom et une origine commune : une forme de christianisme ancien marquée par la recherche de pureté, de révélation intérieure, et d’indépendance vis-à-vis des structures religieuses officielles.
Le texte n’a jamais été reconnu comme canonique, mais il témoigne de la diversité des évangiles non retenus, et de la richesse des courants mystiques aux marges du christianisme antique.
L’Évangile cité par Clément : un enseignement sur la continence
Dans ses écrits, Clément d’Alexandrie cite plusieurs passages d’un texte appelé Évangile des Égyptiens, utilisé dans les milieux chrétiens radicaux, notamment les encratites, partisans d’une vie ascétique stricte.
Ce texte, aujourd’hui perdu, contenait un dialogue entre Salomé et Jésus. Elle l’interrogeait sur la nécessité de procréer, et Jésus répondait par une vision symbolique du salut, accessible à ceux qui refusent les attaches terrestres.
Cette version était lue comme un appel à l’abstinence totale, considérée comme une voie de perfection spirituelle. L’Église a rapidement pris ses distances avec cette approche.
Le texte copte de Nag Hammadi : révélations symboliques et figures célestes
Une autre version, retrouvée en 1945 à Nag Hammadi, est connue sous le nom complet d’Évangile des Égyptiens – Le Saint Livre du Grand Invisible Esprit.
Il s’agit d’un texte gnostique, écrit en copte, probablement traduit du grec, et composé entre la fin du IIe et le début du IIIe siècle.
Le texte adopte la forme d’un discours visionnaire, attribué à des figures célestes comme Seth ou Yesseus Mazareus. Il contient des prières, des louanges, des listes d’émanations divines, et des affirmations sur la lumière, le silence, et le monde invisible.
Il ne raconte pas la vie de Jésus, mais propose une cosmologie mystique, où l’âme doit se libérer des puissances qui gouvernent le monde matériel.
Pourquoi ce texte a été exclu du canon biblique
Les deux versions de l’Évangile des Égyptiens ont été rejetées pour des raisons différentes :
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La version citée par Clément était trop radicale dans son ascétisme, rejetant mariage et procréation, ce qui heurtait la conception chrétienne du corps et des sacrements.
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La version gnostique de Nag Hammadi proposait une vision du monde totalement étrangère à la tradition apostolique, reposant sur une révélation ésotérique réservée à quelques élus.
Ces textes n’étaient pas destinés à l’Église universelle, mais à des communautés restreintes, souvent en opposition avec la structure naissante de l’Église.
Ce que ce texte révèle sur la diversité du christianisme ancien
L’Évangile des Égyptiens, sous ses deux formes, témoigne de la pluralité des voix présentes dans les premiers siècles du christianisme.
Il révèle des courants plus mystiques, intérieurs, ascétiques, parfois anti-institutionnels, qui cherchaient une voie plus directe vers le divin.
Il ne s’agit pas d’une simple variante. C’est une autre logique, où l’accomplissement spirituel passe par le silence, la lumière intérieure, et le renoncement au monde visible.
Ce texte ne remplace rien. Il laisse entendre un autre souffle.
Questions fréquentes sur l’Évangile des Égyptiens
1. Ce texte est-il un évangile racontant la vie de Jésus ?
Non. Il ne contient aucun récit de la vie de Jésus, ni miracle, ni parabole. C’est un texte mystique ou ascétique, selon la version, qui transmet des révélations symboliques.
2. Combien de versions de ce texte existe-t-il ?
Deux versions principales : l’une citée par Clément d’Alexandrie, aujourd’hui perdue, et une autre retrouvée à Nag Hammadi en copte.
3. Que dit Clément d’Alexandrie de ce texte ?
Il cite un dialogue entre Jésus et Salomé, sur le renoncement à la procréation, utilisé par des groupes encratites partisans de la chasteté absolue.
4. Qu’est-ce que la version de Nag Hammadi ?
Un texte gnostique, très symbolique, composé de louanges, de noms divins, et d’enseignements célestes, destiné à une élite spirituelle.
5. À quelle époque ce texte a-t-il été écrit ?
La version copte date du IIIe siècle, traduite du grec. La version citée par Clément est probablement antérieure, autour du IIe siècle.
6. Pourquoi ce texte a-t-il été rejeté par l’Église ?
Parce qu’il développe des idées contraires à la foi chrétienne traditionnelle, notamment sur le corps, le mariage, et la création matérielle, vue comme mauvaise.
7. Est-ce que ce texte parle du Christ ?
Dans la version de Nag Hammadi, le Christ est évoqué sous une forme céleste, voilée, associé à des noms ésotériques comme Yesseus Mazareus. Ce n’est pas une christologie incarnée.
8. Ce texte est-il encore lu aujourd’hui ?
Oui, par les historiens, les spécialistes de la gnose, et les lecteurs intéressés par une spiritualité mystique non institutionnelle.
9. Où peut-on lire ce texte en français ?
Dans les Écrits gnostiques (Pléiade), ou dans des éditions spécialisées chez Cerf, Bayard, ou Albin Michel, avec traduction du copte et appareil critique.
10. Ce texte était-il lu dans les premières communautés chrétiennes ?
Il a circulé dans des milieux marginaux ou dissidents, mais n’a jamais été lu dans les assemblées liturgiques officielles.