Un texte ancien à la frontière de deux traditions
L’Ascension d’Ésaïe est un écrit apocryphe judéo-chrétien, probablement composé entre le Ier et le IIIe siècle, qui combine des éléments issus du judaïsme apocalyptique et des interpolations chrétiennes.
Le texte est transmis en plusieurs versions éthiopiennes, grecques, latines et slavonnes. La version éthiopienne complète (en guèze) est la plus conservée aujourd’hui.
Ce texte développe deux volets distincts : d’une part, une persécution et un martyre terrestre sous le roi Manassé, et d’autre part, une révélation céleste, où le prophète Ésaïe est élevé à travers sept cieux jusqu’à voir le Fils de Dieu descendre dans le monde.
Composition, langue et structure du texte
L’Ascension d’Ésaïe est un texte composite, rédigé en plusieurs étapes :
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Une Passion d’Ésaïe, probablement juive, centrée sur le martyre du prophète, persécuté par Béliar (figure du mal), sous l’autorité du roi Manassé.
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Une vision céleste, d’origine judéo-chrétienne, qui décrit l’ascension de l’âme d’Ésaïe à travers les sept cieux, et sa vision de l’incarnation du Christ.
Le texte a été rédigé initialement en grec, mais la version la plus complète est éthiopienne. Les passages chrétiens ont été insérés dans un récit juif plus ancien, donnant un texte à la fois unitif et contrasté.
Le contenu : martyre sur terre, révélation dans les cieux
La première partie raconte comment Ésaïe est mis à mort par Manassé, roi d’Israël, sous l’influence d’un esprit maléfique. Il est scié en deux, selon une tradition reprise dans l’épître aux Hébreux (11,37).
La seconde partie décrit une ascension spirituelle guidée par un ange, à travers sept niveaux célestes :
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Il découvre l’ordre hiérarchique des puissances célestes,
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Il assiste à la descente volontaire du Fils à travers les cieux, sans que les anges ne remarquent sa présence,
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Il voit comment le Christ descend dans le monde, prend forme humaine sans être reconnu, et revient glorifié.
Le texte insiste sur le silence du mystère, la pureté du Christ, et la transparence de son passage dans les sphères spirituelles.
Pourquoi ce texte est resté en marge du canon
L’Ascension d’Ésaïe n’a pas été intégrée à la Bible pour plusieurs raisons :
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Sa structure composite, mêlant traditions juives et chrétiennes,
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Son absence de paternité apostolique,
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Son cosmologie spéculative, peu compatible avec l’enseignement théologique unifié de l’Église,
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Le caractère apocalyptique et ésotérique du récit.
Il a toutefois été lu dans certains milieux chrétiens orientaux, notamment en Éthiopie, et parfois cité avec respect par certains auteurs patristiques.
Ce que ce texte révèle sur les croyances anciennes
L’Ascension d’Ésaïe donne un aperçu rare d’une époque où le judaïsme et le christianisme n’étaient pas encore entièrement séparés.
Il témoigne d’une foi axée sur le combat spirituel, le martyre des justes, et la vision d’un Christ invisible, qui traverse les mondes sans être vu, pour sauver l’humanité.
Ce texte intéresse aujourd’hui les historiens des religions pour sa valeur documentaire, mais aussi les lecteurs contemporains sensibles à une mystique du silence, de la transcendance, et du mystère incarné.
Questions fréquentes sur l’Ascension d’Ésaïe
1. Ce texte fait-il partie de la Bible ?
Non. L’Ascension d’Ésaïe est un texte apocryphe, non inclus dans le canon biblique, mais lu dans certains milieux chrétiens anciens.
2. Ce texte est-il d’origine juive ou chrétienne ?
Les deux. Il contient une base juive ancienne (le martyre du prophète Ésaïe) et des ajouts chrétiens centrés sur la vision céleste et l’incarnation du Christ.
3. Dans quelle langue a-t-il été écrit ?
Le texte a été rédigé en grec, mais la version la plus complète a été conservée en guèze (éthiopien ancien).
4. Quelle est sa date probable de composition ?
Entre le Ier siècle et le début du IIIe siècle, avec plusieurs couches rédactionnelles.
5. Que raconte la première partie ?
Elle décrit le martyre d’Ésaïe, mis à mort sous le roi Manassé, influencé par un esprit maléfique appelé Béliar.
6. Que raconte la partie céleste du texte ?
Elle présente une vision du Christ descendant à travers les sept cieux, puis remontant après sa mission terrestre, dans une forme invisible aux yeux des puissances célestes.
7. Pourquoi ce texte a-t-il été écarté du canon ?
À cause de sa structure complexe, de son origine mixte, et de sa cosmologie spéculative, perçue comme trop éloignée de l’enseignement apostolique.
8. Ce texte a-t-il influencé d’autres écrits ?
Oui. Il a influencé certaines visions apocalyptiques chrétiennes et la représentation du martyre des prophètes dans la tradition chrétienne ancienne.
9. Est-il encore lu aujourd’hui ?
Il est étudié par les historiens des religions, les théologiens, et parfois lu dans les Églises éthiopiennes, où il a été conservé.
10. Où peut-on lire ce texte en français ?
Il est accessible dans les Écrits apocryphes chrétiens (Pléiade) et dans des traductions publiées par des éditeurs comme Cerf, Bayard, ou dans des collections universitaires.