Ils allument une bougie, posent leurs doigts sur la planche Ouija, et rient. Au début, c’est un jeu. Une curiosité. Mais parfois, ce jeu dérape. Ce qui devait être un simple contact avec “l’au-delà” devient une plongée dans la folie. Depuis des années, les psychiatres tirent la sonnette d’alarme : le spiritisme, pratiqué sans recul, peut réveiller des troubles graves… et mener jusqu’à la mort.
Quand la “voix des esprits” prend le contrôle
Dans les hôpitaux psychiatriques, certains patients sont persuadés qu’une entité parle à travers eux, les guide, ou les contrôle. Ce phénomène porte un nom : le délire de possession.
Le docteur Jean Gros et d’autres spécialistes le décrivent souvent : chez les personnes fragiles, les séances de spiritisme peuvent agir comme un déclencheur. Les signes du quotidien deviennent des messages, les rêves se transforment en révélations, et la réalité se brouille.
Le DSM-5, la référence mondiale en psychiatrie, insiste sur un point essentiel : il faut distinguer les croyances culturelles normales des symptômes délirants. Mais quand la croyance tourne à l’obsession, la frontière s’efface.
Le piège psychique des séances de spiritisme
Les études cliniques le confirment : les personnes les plus vulnérables psychologiquement peuvent plonger dans la confusion après une séance. Certaines affirment entendre une voix leur dicter quoi faire. D’autres croient obéir à une force invisible.
Chez les sujets psychotiques, cette emprise imaginaire peut virer au drame : automutilation, fugue, voire suicide.
Les adolescents, souvent en quête de sensations fortes, sont particulièrement exposés. Le fameux effet idéomoteur – ce mouvement inconscient qui fait bouger la planche – suffit à créer une illusion de contact. Ajoutez l’ambiance sombre, la tension, la peur… et le cerveau bascule facilement dans la panique ou la déréalisation.
Quand la folie se déguise en foi
Des affaires médicales et judiciaires ont montré comment certaines croyances spirites peuvent virer au tragique. Des malades refusant leurs traitements au nom d’un “ordre divin”. D’autres se blessant pour “chasser un démon”.
Ces situations, recensées dans des rapports de psychiatrie légale, rappellent qu’un délire à thématique spirituelle peut devenir mortel s’il n’est pas pris en charge.
Le vrai danger n’est pas dans les esprits, mais dans l’esprit
Le spiritisme, en soi, ne tue pas. Ce sont les voix intérieures, amplifiées par la peur ou la maladie, qui mènent au pire.
Quand la folie se déguise en foi, la frontière entre le monde des morts et celui des vivants devient terriblement fragile.
En France aussi, le spiritisme a parfois viré au drame
L’affaire des possédés de Loudun
Au XVIIᵉ siècle, dans la petite ville de Loudun, des religieuses affirment être possédées après avoir invoqué des esprits. Très vite, le phénomène dégénère : crises, convulsions, accusations de sorcellerie.
Le prêtre Urbain Grandier est accusé d’avoir pactisé avec le diable et sera brûlé vif en 1634.
Cette affaire, aujourd’hui étudiée par les historiens, illustre la manière dont des croyances spirituelles peuvent devenir collectives et destructrices.
L’histoire complète est détaillée dans l’affaire des possédés de Loudun
Un cas de “démonopathie” étudié en psychiatrie
En 1939, les médecins Jean Lhermitte et Beaudoin décrivent le cas d’un patient persuadé d’avoir conclu un pacte avec le diable.
Il parle de voix, de signes, de forces invisibles qui le contrôlent.
À l’époque, on parle de “démonopathie”. Aujourd’hui, on y verrait plutôt un délire mystique lié à une psychose maniaco-dépressive.
Ce cas, analysé dans la littérature psychiatrique française, montre comment une croyance spirite peut être interprétée comme un trouble mental lorsqu’elle devient incontrôlable.
Les auteurs en donnent une description détaillée dans leur étude publiée sur Histoire de la Folie
Découvrez aussi l’abeille Lucifer :
Pour en savoir plus sur la « Megachile lucifer » et les raisons pour lesquelles la nature lui a donné une apparence si diabolique, consultez notre article
